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Notre-Dame de Paris, 15 février 1981

 

[PAGE 2] L'Orient n'a pas connu d'orateur plus célèbre et plus célébré que Jean d'Antioche, surnommé, au 6e siècle, Bouche d'or, en grec Chrysostome. Un temps, les rives de l'Hellade ont pu croire que Démosthène était revenu. Mais cette voix clamait aujourd'hui l'évangile aux Grecs de l'Orient et de l'Occident. On prête à son maître, le célèbre rhéteur Libanios, mourant, la réponse à qui lui demandait quel disciple serait digne de lui succéder : « Jean, dit-il, si les chrétiens ne l'avaient pas volé ! » Comme les grands crus, ses discours ont bien vieilli et semblent plus proches de nous que nombre de sermons du siècle passé.

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Né dans la grande ville d'Antioche de Syrie, au milieu du 4e siècle, Jean y passe les plus heureuses années de sa vie. Il lui demeure profondément attaché, au milieu de la diversité de ses charges.

Comme celle de Théodore de Mopsueste, son ami, sa famille est noble et aisée. Le père, général de l'année d'Orient, meurt jeune. Sa mère, veuve à vingt ans, refusa de se remarier pour se consacrer à l'éducation de son fils. Femme étonnante, cette Anthouse, admirée par les païens comme par les chrétiens. [PAGE 3] Jean lui-même rapporte la réflexion de son maitre Libanios : « Ah ! quelles femmes on trouve chez les chrétiens ! » (A une jeune veuve, 2).

Anthouse veille à donner à son fils la formation classique la plus accomplie. A l'école de Libanios, le jeune étudiant affirma rapidement un don exceptionnel pour la parole. La mère veillait avec le même souci à la formation chrétienne. Jean ne reçut le baptême, selon l'habitude qui s'était introduite à l'époque, que vers 369. Il pouvait avoir dix-huit ans.

Le néophyte, dans la ferveur de sa conversion, voulut immédiatement s'enfoncer dans le désert pour mener une vie de moine. Sur les instances de sa mère, il y renonça temporairement et commença une carrière, qui s'annonçait brillante.

Sous l'influence de Basile, Jean renonçe au monde, se fait d'abord moine dans un couvent, puis ermite dans une caverne, jusqu'au moment où sa santé, ébranlée par des austérités, lui rappela qu'il était temps de vivre pour les autres.

Le nouveau moine ne s'était pas limité à mener une vie ascétique, il se consacra, selon la tradition monastique d'Antioche, à l'étude biblique et théologique, soucieux avant tout de cerner le sens littéral du texte sacré, allergique comme toute l'école d'Antioche à l'allégorisme qui fleurissait à Alexandrie. Diodore de Tarse était alors le maître incontesté dans la cité.

Rentré dans sa ville natale, Jean est ordonné diacre, puis prêtre, au bout de cinq ans. Pour se préparer sans doute à son ministère sacerdotal, il rédigea son premier traité Sur le sacerdoce, un des ouvrages que les générations se sont passé, considéré comme le livre de chevet et le bréviaire des prêtres de tous les temps.

L'évêque d'Antioche, Flavien, plus zélé qu'éloquent, fut heureux de se décharger du ministère de la parole sur le jeune Jean, admirablement doué et préparé pour cette tâche. Ses dons, sa formation, sa culture biblique, la ferveur de son zèle tout allait servir sa tâche apostolique.

Heureuse époque que celle d'Antioche, où le jeune prêtre peut évangéliser un peuple avec lequel il fait corps, dont il partage l'existence quotidienne, à qui il cherche à communiquer sa ferveur évangélique et à inculquer les mœurs de Dieu. Les fidèles, s'ils ne suivent pas toujours ses injonctions, l'écoutent, avec une fidélité inlassable.

Prédicateur infatigable, Jean ne se lasse pas de parler et de rompre au peuple affamé le pain de la parole : « Je ne peux laisser passer de jour sans vous nourrir des trésors de la divine Écriture » (In Gen. hom. 28, 1). A ces auditeurs fascinés, il expose les livres de la Bible, les uns après les autres ; il commente le texte, l'éclaire d'images et de comparaisons, trouve le mot qui fait pchitt, l'allusion qui amuse et instruit. Son mouvement oratoire, sans effort ni excès, provoque souvent les applaudissements d'un peuple médusé.

« Quand vous m'applaudissez, j'éprouve sur le coup une satisfaction. Pourquoi ne pas le reconnaître ? Je m'en réjouis et suis heureux. Mais rentré chez moi, je me mets à considérer que ceux qui m'applaudissent ne tirent aucun profit de mon sermon, la leçon est ensevelie sous le bruit et la louange. Alors je [PAGE 4] suis triste, je pousse des soupirs et je pleure ; j'ai le sentiment d'avoir parlé en vain » (In Act. hom. 10, 4).

L'homélie de Jean n'est pas un discours bâti avec rigueur, ni fleuri à la manière des Cappadociens. L'orateur est de plain-pied avec son public. Il ne parle d'ailleurs jamais de la cathèdre mais toujours de l'ambon, proche du peuple, soudé à lui. Les entrées en matière sont souvent prolixes. L'orateur y fait mention d'une nouvelle qui court la ville, d'un événement qui défraie la chronique ; il raconte ses épreuves de santé, la maladie qui l'a éloigné quelque temps. Puis confesse tout de go : « De prêcher me rend la santé. Dès que j'ouvre la bouche, toute fatigue disparaît. »

En 397 mourut, à Constantinople, le patriarche Nectaire. Il avait été promu, en 381, par l'empereur, alors qu'il était laïc et préteur, à la démission de Grégoire de Nazianze, lassé des « criaillements des clercs ». Digne mais fastueux, le patriarche avait été un parfait prélat de cour.

La cour, en l'occurrence le tout-puissant Eutrope, chercha un homme nouveau, au-dessus des intrigues et des rivalités. Ce qui fit avorter les projets de Théophile d'Alexandrie, qui cherchait à y placer un homme à sa dévotion. On fit mander clandestinement le prêtre Jean, à Antioche, on l'amena dans la capitale, où le pharaon chrétien Théophile, bon gré ou plutôt malgré, dut l'ordonner.

Du jour au lendemain, le moine d'Antioche se trouve propulsé au premier rang, il devient le premier personnage de l'Église d'Orient. Et la capitale fit fête à l'éloquence attique de son nouveau pasteur. Le peuple, avec ferveur ; clercs et notables, avec réserve.

Le nouveau patriarche ne se contente pas de parler, comme à Antioche, il est conscient de porter la responsabilité de son Église, il tient à la conduire, il veut réformer les abus, christianiser les mœurs. Il paie d'exemple, mène « une vie de Cyclope », vend les meubles d'art et les objets de luxe, amassés par son prédécesseur.

Jean s'efforce également de faire travailler les moines fainéants, qui encombrent la cité, oblige les clercs de mener une vie sans reproche et… sans compagne clandestine, évangélise les campagnes, jusque là délaissées, lutte contre toutes les sectes hérétiques, ramène les dissidents à l'orthodoxie, intervient dans les communautés, où les évêques ne donnent pas l'exemple.

Là ne s'arrête pas le zèle du patriarche. Il ne ménage ni les grands ni la cour. Il mène campagne contre les excès du luxe et les abus de la richesse. Ce qui indispose Eutrope d'abord, puis, après sa chute, l'impératrice Eudoxie, irritable et cupide. Il reproche à cette dernière, entre autres choses, d'avoir convoité et pris une propriété à son possesseur, comme Jézabel, la femme du roi Achab.

L'impératrice complota la perte du fougueux apôtre. Elle trouva un allié inconditionnel dans le patriarche d'Alexandrie, lui-même dénoncé pour des agissements peu chrétiens. Ce dernier sut manœuvrer si habilement que d'accusé il devint accusateur ; il convoqua le fameux synode du Chêne, qui déposa le [PAGE 5] patriarche Jean. La cour l'envoya en exil.

Ce premier exil fut de courte durée. Le mécontentement du peuple fut tel que l'impératrice dut rappeler l'évêque. La paix ne dura que deux mois. L'érection d'une statue en argent de l'impératrice, les réjouissances dispendieuses qui l'accompagnèrent furent vivement blâmées par le patriarche, qui connaissait la misère de la population.

Eudoxie se décida à se débarrasser d'un pasteur décidément irrécupérable pour la cour et ses intérêts. Elle fit exiler Jean d'abord à Cucuse, dans la petite Arménie, puis, plus tard, sur la côte orientale de la Mer Noire. Nous pouvons suivre le long calvaire, dans la correspondance qu'il adressa à une veuve, Olympias. Jean finit par mourir d'épuisement, près de la tombe du martyr Basilisque. Ses derniers mots furent : « Gloire à Dieu pour toutes choses ! » C'était le 14 septembre 407.

L'œuvre de cet homme est considérable, elle est la plus étendue de l'Orient. Elle occupe quatorze volumes de la Patrologie de Migne. Il s'agit essentiellement d'une œuvre pastorale et spirituelle. La plupart des textes ont été prêchés et recueillis par des sténographes diligents. Aucune concession n'y est faite à la systématisation théologique, si chère à Augustin.

Nous y trouvons des homélies sur les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament, des sermons pour les fêtes liturgiques et diverses circonstances, des traités sur le sacerdoce, la virginité et la viduité, l'éducation des enfants ou contre les païens et les juifs. La correspondance elle-même est le prolongement de son action pastorale. Jusque dans l'exil, l'évêque écrit pour soutenir et consoler, plus soucieux des autres que de sa propre épreuve.

La Bible occupe une place éminente dans cette œuvre. Aucun autre écrivain ancien ne peut aligner une série aussi longue, aussi diversifiée de commentaires sur l'Écriture. Jean y cherche d'abord à cerner le texte, à analyser les scènes de l'évangile, proches de la vie dont il sait faire saillir l'actualité. L'évêque ne cache pas son admiration pour saint Paul auquel il consacre sept homélies, qui tracent son portrait, mieux son panégyrique au sens classique du terme. Toutes les semaines, il relit les lettres de l'Apôtre, son livre de chevet.

Exégète sans concession, moraliste incomparable, Jean n'est pas préoccupé de spéculation mais d'action. Psychologue raffiné, mûri par l'expérience pastorale, au contact des hommes les plus divers : laïcs et moines, petit peuple et dames de haut rang, l'évêque sait pénétrer et analyser les replis de nos cœurs de chair. Il sait en dévoiler les blessures et les faiblesses, prévenir les tentations et les risques, diagnostiquer la maladie à coup sûr, et décider le malade à accueillir le remède proposé.

Moraliste au sens noble de ce terme, Jean veut convertir, changer les mentalités et les cœurs. Son souci permanent est de faire respirer les chrétiens à la hauteur de leur foi et de leur Dieu. Il fait souvent penser à Augustin d'Hippone : moins spéculatif dans la pensée, plus décanté dans le verbe et dans l'art, plus simple de ton, Jean est tour-à-tour persuasif, pathétique, majestueux.

[PAGE 6] Ce directeur de conscience sait, avec la même pénétration, diriger et conseiller une âme, retourner une foule, dominer un tumulte, conduire une assemblée, comme sans effort, par une grâce qui lui est innée. Le petit peuple qui a l'intuition des simples ne s'y est pas trompé : d'emblée il a compris qu'il était considéré, aimé.

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Pasteur, Jean Chrysostome comme Ambroise et Augustin, a préparé les catéchumènes d'Antioche et de Constantinople au baptême. Au cours de la vigile pascale de 404, l'empereur, poussé par Théophile d'Alexandrie, veut empêcher Jean de procéder au baptême. La troupe, envoyée dans le baptistère, moleste les fidèles et les catéchumènes ; des femmes fuient la piscine sans avoir eu le temps de se revêtir, les eaux baptismales sont empourprées du sang des néophytes. Pâques sanglantes, qui seront suivies par l'exil de l'évêque.

De la catéchèse de Jean nous possédions déjà plusieurs homélies baptismales. Huit autres ont été retrouvées récemment au Mont Athos. Jean Chrysostome nous fournit donc un abondant dossier catéchétique, plus riche pour le baptême que pour l'eucharistie. Sa prédication par ailleurs sur « le repas du Seigneur » est si importante qu'on a pu surnommer Jean « le docteur de l'eucharistie ». A Antioche comme à Constantinople, à la fin de la vigile pascale, le baptême achevé, l'onction du saint-chrême accomplie, la procession des nouveaux chrétiens se forme, toute de blanc vêtue. Les néophytes s'avancent sans bijoux, ni collier, les cheveux couleur de nuit flottant sur une tunique immaculée. Ils pénètrent, avec une légèreté d'elfes, dans la basilique illuminée. Un frisson parcourt l'assemblée.

Chaque famille cherche du regard le parent, le proche, l'ami, dans le cortège qui s'avance. Les néophytes traversent l'allée centrale, montent jusqu'à l'autel et forment une couronne blanche à l'intérieur des chancels, qui enclosent l'autel. Le baptême s'achève en festin eucharistique. La communauté chante le Psaume 22 : « Le Seigneur est mon berger. »

Grégoire de Nysse comme Ambroise interprète ce chant comme une introduction aux mystères.

« Ainsi lavés et marqués du sceau, le peuple s'avance vers l'autel du Christ. Il a hâte de s'approcher du banquet céleste. Il vient donc et trouve l'autel saint tout paré, il s'écrie (avec le psalmiste) : Tu as préparé devant moi une table. Ta coupe déborde d'un breuvage merveilleux » (Ambroise de Milan, Les mystères, 43).

[PAGE 7] Un trait rose dessine l'aurore à l'horizon. Les étoiles scintillent encore dans le ciel limpide d'Antioche. Jean Chrysostome y prend appui, dans une homélie fameuse, pour comparer les néophytes, les nouveaux plants, les nouveaux-nés de l'Église, qu'il appelle « les étoiles de la terre », à celles du ciel : aujourd'hui celles-là brillent d'une lumière plus éclatante. Les dernières s'éteignent avec le jour, les autres, les néophytes, sont les étoiles du matin, qui brillent d'un jour éternel.

La communauté d'Antioche, spontanée et chaleureuse, accueille les nouveaux baptisés par le baiser de paix, un chaste baiser sur la bouche, nous précise Jean Chrysostome, comme le font les Russes aujourd'hui encore. Baiser, qui est à la fois accueil des nouveaux membres et réconciliation indispensable, pour s'approcher de l'autel, afin que notre offrande soit agréée. Comment communier au corps du Christ « sans sceller le lien qui le constitue » (Cyrille de Jérsualem, Catéchèse 23).

Les Orientaux, pour respecter l'unité de l'action liturgique, placent toujours le baiser de paix avant la grande prière eucharistique. Chez eux, il scelle et conclut la liturgie de la parole. L'Afrique et Rome, en revanche, dès le 4e siècle, le placent après la prière eucharistique et le conçoivent comme une préparation immédiate à la communion.

Les jours de baptême, surtout après la longue veillée pascale, il n'y a pas de liturgie de la parole, pas d'homélie. L'évêque explique les rites de la messe, au cours de la semaine pascale. Il ne faudrait d'ailleurs pas juxtaposer liturgie de la parole et liturgie du pain, encore que la première ne soit pas nécessairement suivie de la seconde. « Vouloir les séparer à nouveau serait une régression absurde », dit le Père Louis Bouyer.

L'iconographie, la mosaïque de Kiev par exemple, présente prédication et célébration comme « deux tables inséparables, où le même pain de vie nous est donné. » La Parole annoncée s'achève et se réalise dans le Verbe fait chair, eucharistiée. Irénée nous a montré, l'an dernier, l'unité, dans une même économie du salut.

La structure de la liturgie du pain, la messe des fidèles, est nettement dessinée par les récits évangéliques de l'institution : « Jésus prit du pain, prononça une bénédiction (eucharistie), le rompit, et le distribua. » Ce schème forme le noyau de toutes les liturgies de l'Orient et de l'Occident.

Le silence une fois rétabli dans l'assemblée, l'évêque invite alors comme aujourd'hui encoreà élever les cœurs, sursum corda, pour respirer à la hauteur « des saints mystères », au niveau céleste où se joue la liturgie. Le célébrant, au nom de l'assemblée, adresse sa prière au Père. L'évêque dit « Nous », car « est la langue commune de l'Église, quand il offre l'oblation et immole le sacrifice de la communauté. »

Au milieu du 2e siècle, Justin présente en ces termes la prière eucharistique : « Celui qui préside adresse semblablement prières et action de graces, autant qu'il a force. Et tout le peuple répond l'acclamation : Amen » (Première Apologie, 67, 5). L'essentiel y est dit. Encore faut-il l'expliciter.

[PAGE 8] En quoi consiste cette prière qui rend grâces et consacre, consacre par une action de grâces, qu'aujourd'hui nous appelons prière eucharistique et nos frères d'Orient « anaphore », l'action d'élever vers Dieu ?

La prière s'ouvre par une préface, mot qui n'exprime pas un simple préliminaire et ne signifie pas « dire avant » mais dire « à haute voix », proclamer. C'est la proclamation des merveilles de Dieu, de la création à l'œuvre du salut, dans une même et unique économie. L'évocation ou mémorial de l'œuvre accomplie s'infléchit en une prière pour son achèvement, « en rassemblant des quatre vents l'Église sanctifiée, dans le royaume que tu lui as préparé », dit la Didachè.

A qui veut, au-delà de toutes les ramifications, de toutes les dérivations des liturgies diverses, en Orient et en Occident, retrouver la ligne primitive, inspirée par la prière juive, l'anaphore des Constitutions apostoliques, appelée « Liturgie clémentine », fournit le modèle le mieux construit. Vous le trouverez dans les Prières des premiers chrétiens.

Cette prière eucharistique, majestueuse, d'une seule coulée, sans retour en arrière, sans répétition, sans interruption, part du Père, qui dévoile son économie, de la création aux mirabilia de l'histoire du salut, passe aux œuvres du Fils, de son enseignement à sa passion et à sa glorification : le mystère pascal, et s'achève dans l'œuvre ecclésiale de l'Esprit, qui sanctifie les oblats et l'assemblée, et mène toute l'histoire à son achèvement.

Vous avez pu remarquer, et nous en avons fait la démonstration ailleurs, la prière eucharistique reprend les thèmes de la catéchèse baptismale (et non pas le contraire). Elle est la confession devenue action de grâces, la foi devenue mystère eucharistique. Elle est la bonne nouvelle devenue sacramentum redemptionis, le sacrement du salut, en qui s'opère l'œuvre de la bienveillance du Père.

Comme l'histoire du salut et la foi baptismale, la prière eucharistique part de Dieu, qui s'avère Père, et ramène à lui l'humanité rassemblée. Ce qu'exprime la salutation de saint Paul, reprise par la liturgie byzantine, aujourd'hui encore, au début de l'anaphore : « La grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, centre lumineux de toute la révélation, la tendresse de Dieu-Père, dévoilée en l'amour crucifié, et la communion de l'Esprit saint qui achève l'œuvre trinitaire, soient avec vous tous ! » (2 Co 13, 13).

L'Église ancienne ne dissèque pas l'anaphore, elle ne cherche pas à trouver les paroles essentielles, comme le fera la scolastique : pour elle la prière eucharistique dans sa totalité et dans son déroulement est consécratoire. Et non pas simplement les paroles de la Cène. Ce qui permet à la liturgie d'Orient de respecter l'admirable économie trinitaire, dans la coulée d'une prière unique.

A cette prière du célébrant, dite et proclamée au nom de toute l'assemblée, le peuple réuni dit l'Amen de l'acquiescement, dans un tonnerre de Dieu, ajoute Jérôme.

Suit la fraction du pain, et, dès le 4e siècle, le Notre Père, la prière des fils et des filles de Dieu, rassemblés par le Père. La prière du baptême devient la prière de l'eucharistie. Le célébrant dit : [PAGE 9] « Les choses saintes pour ceux qui sont saints ! » Et le peuple répond : « Un seul est saint, un seul est Seigneur, Jésus-Christ. »

L'évêque communie et, par ordre, les prêtres, les diacres, les néophytes, les autres fidèles. Le célébrant donne le pain consacré, en disant : « Le corps du Christ. »

« Quand tu approches, dit Cyrille de Jérusalem, ne t'avance pas en tendant les paumes des mains, n'écarte pas les doigts ; place la main gauche sous la droite, pour en faire un trône à celle qui va recevoir le Roi. Reçois dans le creux de la main le corps du Christ, en disant : Amen. »

Nous savons combien saint Augustin aimait à commenter cet Amen du communiant. « A ce que vous êtes, vous répondez Amen. Sois un membre du Christ, afin que ton Amen soit vrai ! » (Sermon 272). Et dans la Cité de Dieu, il précise en théologien : « Voici le sacrifice des chrétiens : être tous un seul corps en Jésus-Christ » (X, 6).

Pendant la communion, on chante un Psaume approprié, parfois une antienne eucharistique. A Jérusalem, c'est le Psaume 33 qui est utilisé : « Je bénirai le Seigneur en tout temps. » Et le peuple reprend en refrain : « Goûtez et voyez combien bon est le Seigneur ! » La nuit de Pâques, les néophytes, comme nous l'avons vu, reçoivent un breuvage de fête : du lait mêlé de miel. Il doit évoquer la Terre promise qui s'est ouverte devant eux.

Jean Chrysostome médite sur la tendresse de Dieu, qui se dévoile dans l'eucharistie. « Quel pasteur a jamais nourri ses brebis de sa propre chair ? Que dis-je, un pasteur ! Des mères souvent abandonnent, dès la naissance, des enfants à des nourrices. Jésus-Christ, lui, nous nourrit de son propre sang et nous incorpore à lui. »

Et ailleurs : « Que parlé-je encore de communion ? Nous sommes ce corps même. Qu'est-ce en effet le pain ? Le corps du Christ. Que deviennent les communiants ? Le corps du Christ ; pas plusieurs corps, un seul corps. De même que le pain est fait de beaucoup de grains, si unis que l'on ne les voit plus, alors qu'ils continuent à exister sans que leur distinction apparaisse aux sens, tant ils adhèrent les uns aux autres ; ainsi sommes-nous rattachés au Christ et entre nous. Pourquoi ne témoignons-nous pas la même charité et ne devenons-nous pas, nous aussi, un ? » (In primam epistolam ad Corinthios hom. 24).

L'initiation baptismale à présent est achevée. Entre le Christ et le communiant, entre la Tête et son corps, s'est effectuée une symbiose entre deux vies. Pour décrire cette fusion, les Pères utilisent tour-à-tour la comparaison du feu et du corps, de l'hôte et de la demeure, du chef et de ses membres, de l'époux et de l'épouse. Ce caractère nuptial se réfère à la naissance d'Éve, chair de ma chair, comme l'Église naît, en noces sanglantes ; et à l'idéal matrimonial : deux en une seule chair.

Il serait facile de multiplier les citations où les Pères, Augustin, Jean Chrysostome appliquent les deux expressions bibliques à la communion. « En mangeant la chair de l'eaux, écrit Théodore, en buvant son sang nuptial, ils s'unissent à lui. » Le Cantique des cantiques se prête admirablement à illustrer le [PAGE 10] thème nuptial, déjà rencontré au baptême, plus vrai encore de l'eucharistie, qui mène l'initiation à son achèvement et jusqu'à l'étreinte de Dieu.

Après que néophytes et fidèles ont communié, l'évêque dit une prière finale et renvoie la communauté : « Allez dans la paix du Christ. » Jean Chrysostome dit plus simplement : « Allez en paix. » Néophytes et chrétiens chevronnés s'en retournent, épuisés mais comblés. Tous ont consacré la plus belle de toutes les nuits à célébrer le mystère de la foi. L'aurore se lève sur le jour pascal. La plupart des baptisés retrouvent d'humbles demeures, mais ce jour-là, elles donnent l'hospitalité à leur Seigneur et à leur Dieu. La plus humble chaumière est semée d'étoiles.

Pendant toute la semaine pascale, les néophytes, en vêtements blancs, reviennent à la célébration eucharistique. L'évêque achève sa catéchèse, en expliquant figures bibliques et gestes sacramentels de l'eucharistie. Nous pouvons être surpris que ces explications ne précèdent pas mais suivent la première communion. La raison est simple. Pour l'antiquité chrétienne, l'eucharistie n'est pas une vérité en soi, à part de celles enseignées au cours du carême. Elle est LE sacrement qui contient tout le mystère chrétien, toutes les vérités de la foi. C'était le sens initial de l'antique expression, Mysterium fidei. Non pas un mais LE mystère récapitulatif. La catéchèse, en dévidant l'histoire et les œuvres du salut, avait conduit le catéchumène au cœur du mystère eucharistique. A le creuser, il y trouvera la charte de la perfection et la clef de la vie mystique.

Le dimanche octave de Pâques s'appelle in albis, c'est-à-dire le jour où les néophytes déposent les vêtements blancs. C'est le seuil pour la reprise de la vie quotidienne. Il pouvait sembler aux nouveaux baptisés que la célébration pascale débouchait déjà sur le jour d'éternité. N'était-il pas le huitième jour, au bout de la semaine sabbatique, et donc synonyme d'achèvement et de plénitude ? Il n'en était rien, hélas.

Il s'agissait de reprendre le train de la vie quotidienne, de retourner au travail de tous les jours mais, désormais, le nouveau baptisé pouvait porter au cœur l'éternité de Dieu ; l'espérance reçue lui permettait de percer la nuit du quotidien.

Pasteurs et liturgie recommandaient aux néophytes de vivre l'eucharistie dans l'action de grâces du quotidien. La lumière, qui avait éclairé la nuit pascale, devait transformer toute la vie ; en faire, selon le mot de Clément d'Alexandrie, « un long jour de fête ».

« Si vous demeurez sobres et vigilants, dit Jean Chrysostome, les fêtes se prolongent pour vous, toute la durée du temps. Conservez intact et immaculé votre vêtement nuptial. Votre Époux vous en aimera davantage, votre beauté et votre éclat grandiront de jour en jour et la grdce augmentera au rythme de vos efforts » (Catéchèse VI, 25).

Jean Chrysostome comme Augustin sont visiblement préoccupés de voir ces hommes, ces femmes, ces jeunes, reprendre la vie d'avant, retrouver la grisaille des jours, les dangers et les compromissions de la vie. Tant d'autres baptisés sont allés rejoindre le groupe des médiocres et des tièdes ; quelques-uns se sont [PAGE 11] éloignés définitivement. Une dernière fois, le pasteur les exhorte :

« Respirez à la hauteur de votre dignité, mes bien-aimés ! On vous appelle fidèles, vivez la fidélité. Ne vous mêlez pas à la promiscuité de la foule des mauvais chrétiens. Écoutez ce que je vous dis : Soyez grain et non pas paille. Regardez les bons, suivez leur exemple. Qui se ressemble s'assemble ! »

Une autre année, l'évêque d'Hippone recommande aux néophytes d'emporter sur la route l'Alleluia pascal.

« Alleluia signifie Louez le Seigneur. Louons le Seigneur, frères, par la vie et les lèvres, par le cœur et par la bouche, par la voix et la conduite. Dieu veut que nous disions alleluia, sans qu'il y ait désaccord en celui qui chante. Mettons à l'unisson notre vie et nos lèvres, notre voix et notre conduite.

Chante comme chante le voyageur, chante mais marche. Chante pour soutenir ton effort, ne cultive pas la paresse. Chante et marche. »

« Je vous offrirai, moi votre prêtre, sur l'autel de la terre entière, le travail et la peine du monde. » Ces mots de Teilhard de Chardin veulent décrire ce qu'il appelle « la messe sur le monde ». Non pas contre ou parallèlement à l'eucharistie mais, pour en percevoir les ultimes conséquences, déchiffrer la signification de la matière du pain, transfigurée par l'eucharistie, au point de devenir « corps du Christ », vecteur de sa grâce.

L'eucharistie, comme la croix qui fleurit en arbre de vie, dans l'iconographie des catacombes et des mosaïques, déploie deux dimensions, l'une verticale, l'autre horizontale. Elle trouve sa source dans la tendresse de Dieu, tcl'où elle tire toute sa substance. Ignace d'Antioche l'appelle pour cette raison « agapè », le sacrement de la tendresse.

Tendresse dévoilée douloureusement par Jésus, dans le drame de la croix. « II ne suffit pas de dire, écrit le théologien suédois Anders Nygren, que saint Paul établit un lien entre la notion d'agapè (tendresse) et la théologie de la croix. Elles forment pour lui une seule et même réalité. On ne peut penser l'une, sans évoquer l'autre. Sans la croix du Christ, nous n'aurions jamais été en présence de l'agapè de Dieu. Jamais nous n'en aurions perçu le sens profond. Sans la tendresse de Dieu, la vie du Christ n'aurait jamais abouti à la croix. On ne peut mieux caractériser la pensée paulinienne qu'en parlant de l'agapè de la croix. »

Le drame du calvaire, sacramentalisé dans l'eucharistie, se situe au confluent de deux mouvements, celui de Dieu qui aime l'homme, s'abaisse, se livre totalement dans l'amour désintéressé, gratuit, incompréhensible ; le mouvement du péché qui poursuit son œuvre de mort : ne pouvant atteindre Dieu, il atteint du moins l'Homme-Dieu.

De cette passion tragique et bienheureuse à la fois, l'eucharistie est le mémorial, nous pourrions dire « la mémoire » de l'Église, qui rappelle la route de Dieu vers nous ; et Dieu avec nous sur la route du retour. L'Église rassemble, autour du Christ invisiblement présent, tous les appelés de Dieu, qui marchent vers le royaume.

[PAGE 12] La fraction du pain est donc le sacrement de notre cheminement spirituel, jusqu'à l'union mystique. Avec la communion au corps du Christ commence, selon Grégoire de Nysse, la vie éternelle dont la plénitude ne peut être attendue que dans l'au-delà. Déjà nous en goûtons la saveur. Dès ici-bas, l'extase eucharistique nous en donne un avant-goût, comme tant d'exemples de saints nous le rapportent.

Là Ignace d'Antioche puise la ferveur de son attente et la force de son martyre, le chemin le plus court pour y parvenir. Devenu à son tour « froment de Dieu », sous la morsure des fauves, il veut devenir « le pain Immaculé du Christ » pour la vie incorruptible. En célébrant l'eucharistie sur la tombe des martyrs, l'Église unit deux vies offertes, elle scelle la fusion de deux amours.

Toute la tradition ancienne, reprise par les mystiques du moyen âge et des temps modernes, applique à l'eucharistie ce que chante le Psaume 22 de « la coupe débordante », du vin de « la sobre ivresse ». Déjà Cyprien de Carthage pouvait écrire : « L'ivresse qui vient du calice du Seigneur n'est pas semblable à l'ivresse du vin profane. Le calice du Seigneur enivre, en effet, de manière à nous laisser la raison, il nous amène à la sagesse de l'Esprit ; par lui chacun de nous quitte le goût des choses profanes pour l'intelligence des choses de Dieu » (Lettre 63,11).

Grégoire de Nysse, en prêchant sur l'Ascension du Christ commente à son tour le Psaume 22 : « Le Seigneur est mon berger », chanté pendant la communion. Il utilise la catéchèse eucharistique et sacramentaire pour décrire l'itinéraire spirituel, jusqu'à l'union et l'extase. « Le vin qui réjouit le cœur de l'homme produit dans l'âme une sorte d'ivresse, il transporte l'esprit de ce qui est passager à ce qui demeure. Celui qui a goûté une telle ivresse a changé l'éphémère contre l'éternel ; il étend à de longs jours sa demeure, dans la maison du Seigneur. »

L'évêque de Nysse rejoint ici l'enseignement johannique : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. » L'évangéliste utilise ici pour la première fois, dans le discours eucharistique, l'expression si prégnante de demeurer. Tout l'itinéraire johannique se ramène à quatre verbes : chercher, trouver, suivre, demeurer.

Celui qui demeure en lui est immunisé contre la mort : l'eucharistie en lui est germe d'incorruptibilité, il possède déjà la vie éternelle et béatifique.

La croix glorieuse du Christ est désormais dressée au carrefour de toutes nos routes, à la rencontre des hommes. Les deux bras ouverts veulent étreindre l'humanité entière. Dans la mesure où l'eucharistie nous révèle l'agapè dévoilée dans la passion du Christ, nous prenons conscience de l'amour au travail, au secret de nos cœurs. Dans la souffrance naît la charité. Le message perçu dans la foi doit à son tour fleurir en charité vécue. Il nous faut désormais « vivre l'amour des autres ».

L'attente du Seigneur que nous devons proclamer à chaque célébration eucharistique peut-elle mettre en veilleuse le souci du monde, l'angoisse de son [PAGE 13] attente ? Serions-nous parmi ces naïfs qui, à l'heure des échéances, demandent au Seigneur ce qu'ils auraient dû faire de leur vie ? « La loi d'un pauvre chrétien, disait Bernanos, c'est précisément de donner ce qu'il n'a pas, ou plus exactement ce qui ne lui appartient pas. »

Il existe deux formes d'infidélité à la Cène du Seigneur, l'inconséquence des chrétiens qui ferment leur cœur à ceux qu'ils ontrencontrés dans « le corps du Christ », et l'athéisme d'un progrès social qui occulte la visite de Dieu. Les premiers « mangent leur jugement », dit saint Paul, c'est-à-dire : le pain reçu et non partagé met en contradiction leur confession et leur action, leur foi et leur vie.

Aux chrétiens qui se jettent dans l'action sociale, qui luttent contre toutes les formes de l'injustice, l'eucharistie rappelle que l'effort social lui-même n'est pas une fin en soi : le paradis social devient un désert spirituel, si Dieu en est absent. Construire un monde, sans lui insuffler la charité du Christ, c'est encore construire une prison et non le royaume, que nous recevons comme un présent.

L'eucharistie nous apprend enfin que la charité ne se pèse pas au poids des réalisations et de son efficacité, mais de l'amour qui l'habite et seul la transfigure ; elle peut même comme la croix être un échec : elle a toujours l'efficacité de la bienheureuse passion du Christ.

Peu de pasteurs ont mieux dégagé que Jean Chrysostome la leçon du « pain partagé », lancinant appel à tous les communiants d'imiter le Christ d'Enunaiis. « Le Christ nous a invités à sa table, dit-il, il nous a vêtus, quand nous étions nus, et nous ne l'accueillons pas quand il passe. Il nous a fait boire à sa coupe, et nous lui refusons un verre d'eau fraîche. »

Plus incisif encore, l'évêque de Constantinople s'écrie un jour : Tu vénères l'autel de l'Église, lorsque le corps du Christ y descend. Mais l'autre, qui est le corps du Christ, tu le négliges et tu restes indifférent quand il périt. »

« Cet autel, tu peux le voir dressé partout dans les ruelles et sur les places ; à chaque heure, tu dois y porter l'offrande ; car là est le lieu du sacrifice. Et comme le prêtre, debout à l'autel, appelle l'Esprit, de même toi aussi, tu appelles l'Esprit comme une huile répandue en abondance, par tes paroles et par tes actions. Toutes les fois que tu vois un pauvre avec foi, songe que tu as un autel, sous tes yeux. »

Loin de l'en distraire, la messe plonge le chrétien dans le drame de son temps, dans l'épaisseur de la souffrance humaine. Combien serait hypocrite le fidèle qui demanderait à Dieu « le pain quotidien », en oubliant que la moitié du globe terrestre meurt de faim. Douze millions d'enfants, nous rapportait-on récemment, meurent chaque année, faute de ce pain-là, que les pays repus, nous, nous jetons aux poubelles. « Avec les poubelles d'Europe, nous disait le Secours catholique, on ferait vivre trois villes du Tiers-monde ! »

A qui veut sonder l'inépuisable mystère de l'eucharistie, la fontaine jaillissante de la tendresse de Dieu se révèle. Et son eau doit couler pour ne pas [PAGE 14] croupir, se répandre et non pas se thésauriser. En d'autres termes, vivre nous aussi l'amour des autres. « où il n'y a pas d'amour, dit Jean de la Croix, dans une lettre, mettez-y l'amour et vous y trouverez l'amour. »

Nous voilà parvenus au bout de l'initiation chrétienne et à la fm de nos deux séries de conférences sur les Pères de notre foi. Il nous faut vivre à présent, dans le quotidien, ce mystère entrevu. Tout le temps chrétien est rythmé par l'eucharistie, celle de nos célébrations pascales, celle de nos réunions dominicales, celle de tous les jours, si nous sommes attentifs.

A deux hommes découragés, sans espérance, le Christ sur la route d'Emmaüs découvre le sens des Écritures. Puis dans l'auberge, il leur rompt le pain. A ce geste, à ce simple geste mais qui dit tout, ils ont reconnu le Seigneur… et repris la route pour allumer un feu de joie, qui éclaire et réchauffe désormais le monde.

 

Suggestions de lecture :

Jean Chrysostome, L'eucharistie, école de vie, Les Pères dans la foi 99
Jean Chrysostome, Trois sermons catéchétiques, dans Le baptême d'après les Pères de l'Église, Lettres chrétiennes 1
Et de nombreux autres textes de Jean Chrysostome dans nos collections et dans la collection Sources Chrétiennes

Les enregistrements audio des deux séries de conférences de carême prêchées par A.-G. Hamman à Notre-Dame de Paris peuvent être obtenus sur CD pour 50 euros auprès du site du Carmel de Saint-Sever.